Troisième Dimanche après la Pentecôte - La brebis perdue


La brebis rapportée au bercail sur les épaules du Pasteur.
Réjouissez-vous avec Moi, parce que J’ai retrouvé Ma brebis qui était perdue.

Considérations

L’âme fidèle a vu se clore dans la sainte Liturgie la succession des mystères du Sauveur. L’Esprit-Saint est descendu pour la soutenir dans cette autre partie de la carrière, où ne se déroulera plus devant elle que la féconde simplicité de la vie chrétienne. Il l’instruit et la forme sur les données du Maître divin remonté dans les cieux. Et d’abord il lui montre à prier. Car la prière, disait le Seigneur, doit être de tous les jours et de tous les instants (s. Luc 18, 1); et cependant, nous ne savons ni ce qu’il faut demander, ni comment il convient de le faire. Mais Celui-là le sait, qui aide notre faiblesse, et demande en nous et pour nous par des gémissements inénarrables (Rom. 8, 26).

La prière donc, appuyée sur l’humble repentir des fautes passées et la confiance dans les miséricordes infinies, respire dans l’Introït et toute cette Messe du 3e Dimanche après la Pentecôte, le premier qui se présente à nous en dehors des fêtes et dans toute la simplicité de l’Office du Temps.


Liturgie de la Messe

Introït

Regardez-moi d’un œil favorable et ayez pitié de moi, Seigneur, parce que je suis pauvre et délaissé; voyez mon humiliation et ma peine: pardonnez-moi tous mes péchés, ô mon Dieu. — Ps. Vers Vous, Seigneur, j’ai levé mon âme: mon Dieu, j’ai confiance en Vous, je n’aurai point à rougir. Gloria Patri. Le Seigneur...

Collecte

Oraison. — Protecteur de ceux qui espèrent en Vous, ô Dieu, sans qui rien n’est solide, rien n’est saint: multipliez sur nous les effets de Votre miséricorde; afin que, sous Votre loi et Votre conduite, nous puissions traverser les biens du temps sans perdre ceux de l’éternité. Par Jésus-Christ notre Seigneur.

Épître

Lecture de l’Épître du bienheureux Apôtre Pierre, I Chap. 5.
Mes bien-aimés, humiliez-vous sous la puissante main de Dieu, pour qu’Il vous exalte au temps de Sa visite. Jetez en Lui toutes vos sollicitudes, parce que Lui-même prend soin de vous. Soyez sobres et vigilants; car votre adversaire le diable tourne autour de vous comme un lion rugissant, cherchant qui il pourra dévorer. Résistez-lui forts dans la foi, sachant que les mêmes épreuves arrivent à vos frères qui sont dans le monde. Mais le Dieu de toute grâce qui nous a appelés à Sa gloire éternelle dans le Christ Jésus, après un peu de souffrance, vous redressera Lui-même pour jamais dans Sa stabilité inébranlable. À Lui la gloire et l’empire dans les siècles des siècles. Amen.

Réflexion sur l'Épître

Les misères de cette vie sont l’épreuve que Dieu fait subir à ses soldats, pour les juger et les classer dans l’autre selon leur valeur. Aussi tous, en ce monde, ont leur part de souffrances. Le concours est ouvert, le combat engagé ; l’Arbitre des jeux regarde et compare : bientôt il prononcera sur les mérites divers des combattants, et les appellera du labeur de l’arène au repos du trône où il siège lui-même. Heureux alors ceux qui, reconnaissant la main de Dieu dans l’épreuve, se seront abaissés sous cette main puissante avec amour et confiance ! Contre ces âmes fortes dans la foi, le lion rugissant n’aura pu prévaloir. Sobres et vigilantes dans cette carrière de leur pèlerinage, sans se poser en victimes, sachant bien que tout souffre ici-bas, elles auront uni joyeusement leurs souffrances à celles du Christ, et elles tressailliront dans la manifestation éternelle de sa gloire qui sera aussi leur partage pour les siècles sans fin.

Le Graduel continue d’exciter la confiance de l’âme fidèle. Qu’elle jette tout souci dans le sein du Seigneur: ne l’a-t-il pas toujours exaucée dans ses besoins pressants? Il la vengera, au jour marqué, de tous ses ennemis.

Graduel

Jette tes pensées dans le Seigneur, et Lui-même te nourrira. Lorsque je criais au Seigneur, Il a exaucé ma voix contre ceux qui m’assiègent. Alléluia, alléluia. ℣. Le Dieu juste juge est fort et patient: Sa colère éclate-t-elle donc tous les jours? Alléluia.

Jésus va récupérer la brebis perdue. Pinxit O.D.M.
Le Bon Pasteur va à la recherche de la brebis qui s’est perdue, jusqu’à ce qu’Il la trouve.

Évangile

Suite du saint Évangile selon saint Luc. Chap. 15.
En ce temps là, les publicains et les pécheurs s’approchaient de Jésus pour L’entendre. Or les Pharisiens et les Scribes en murmuraient, disant: Cet homme reçoit les pécheurs et mange avec eux. Et Il leur dit cette parabole: Quel est l’homme d’entre vous qui, ayant cent brebis et venant à perdre l’une d’entre elles, ne laisse pas les quatre-vingt-dix-neuf dans le désert, pour aller à celle qui s’est perdue, jusqu’à ce qu’il l’a trouvée, il la met plein de joie sur ses épaules; et venant chez lui, il convoque ses amis et voisins, leur disant: Réjouissez-vous avec moi, parce que j’ai retrouvé ma brebis qui était perdue. Je vous dis que de même il y aura plus de joie dans le ciel pour un seul pécheur faisant pénitence, que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de pénitence.

Ou quelle est la femme qui, ayant dix drachmes et venant à en perdre une, n’allume pas sa lampe, balayant la maison et cherchant avec grand soin, jusqu’à ce qu’elle la retrouve? Et lorsqu’elle l’a trouvée, elle convoque ses amies et ses voisines, disant: Réjouissez-vous avec moi, parce que j’ai trouvé la drachme que j’avais perdue. Ainsi, Je vous le dis, sera la joie dans l’assemblée des Anges de Dieu pour un seul pécheur faisant pénitence.

Réflexion sur l'Évangile

Cette parabole de la brebis rapportée au bercail sur les épaules du Pasteur était chère aux premiers chrétiens; on la rencontre partout dans les monuments figures des premiers siècles. En même temps qu’elle continue d’affermir notre confiance dans la miséricorde infinie, elle nous rappelle ineffablement le Seigneur Jésus qui naguère rentrait triomphalement dans les cieux, portant avec lui l’humanité perdue et reconquise. «Car quel est ce Pasteur de notre parabole, s’écrie saint Ambroise, sinon le Christ qui te porte en son corps et a pris sur lui tes péchés? Cette brebis est une par le genre, non par le nombre. Riche Pasteur, dont nous tous formons la centième partie du troupeau! Car il a les Anges, il a les Archanges, les Dominations, les Puissances, les Trônes, et le reste, innombrables troupeaux qu’il a laissés sur les montagnes, pour courir après la brebis perdue (Ambr. in Luc 7).»

Mais c’est à saint Grégoire que l’Église demandait aujourd’hui, dans l’Office de la nuit, le commentaire de l’Évangile; la suite de l’Homélie qu’elle lui emprunte complète l’enseignement, par l’explication de la parabole de la femme et des dix drachmes. «Celui qui est signifié par le Pasteur», dit saint Grégoire le Grand, «l’est aussi par la femme. Car il est Dieu, et il est la Sagesse de Dieu. Et parce que l’image du prince est requise sur la drachme, la femme (mulier) a perdu sa drachme, lorsque l’homme, créé à l’image de Dieu, s’est éloigné par le péché de la ressemblance de son Créateur. Mais la femme allume sa lampe, la divine Sagesse apparaît dans l’humanité. Lampe en effet dit lumière dans un vase d’argile; et la lumière dans l’argile, c’est la divinité dans la chair. De cette argile de son corps, la Sagesse dit elle-même: Ma force a séché comme l’argile (Psalm 21, 16). Car de même que l’argile durcit au feu, sa force a séché comme l’argile, parce qu’elle a affermi pour la gloire de la résurrection, dans le creuset des souffrances, la chair qu’elle avait prise. Ayant donc retrouvé la drachme perdue, elle convoque ses amies et ses voisines, disant: Réjouissez-vous avec moi, car j’ai retrouvé la drachme que j’avais perdue. Quelles sont ces amies sinon les célestes Puissances, d’autant plus voisines de la Sagesse éternelle, qu’elles s’en approchent dans la gloire d’une vision sans fin? Mais nous ne devons pas négliger de rechercher pourquoi cette femme, qui figure l’éternelle Sagesse, a dix drachmes, dont elle retrouve l’une, après l’avoir perdue. Il faut donc savoir que le Seigneur a créé, pour le connaître éternellement, la nature des anges et des hommes, et qu’il a fait cette double nature à son image. La femme en conséquence eut dix drachmes; car neuf est le chiffre des chœurs des anges, et l’homme fut créé dixième pour parfaire le nombre des élus; séparé de son Créateur, il ne fut point perdu sans retour, parce que la divine Sagesse, revêtant chair, fit briller à ses yeux sa douce lumière à travers l’argile (saint Grég. Hom. 34 in Evangelia).»

(Dom Prosper Guéranger, L'Année Liturgique)