Le Pharisien et le Publicain (Évangile) La liturgie de ce dimanche nous inculque la vraie notion de l’humilité chrétienne qui consiste à attribuer à la grâce de Dieu tout vrai bien et toute sainteté; car nos actes ne sauraient être surnaturels, c’est-à-dire saints, que s’ils procèdent de l’Esprit-Saint, que Jésus a envoyé à ses apôtres au jour de la Pentecôte et qu’il ne cesse de donner à ceux qui le lui demandent. Notre sanctification est donc une œuvre impossible si nous voulons la faire seuls, car, livrés à nous-mêmes, nous ne sommes qu’impuissants et pécheurs. C’est à Dieu que nous sommes redevables d’éviter le péché, d’en obtenir le pardon, d’en sortir et de faire le bien, puisque personne ne peut même prononcer le saint Nom de Jésus, par un acte de foi surnaturelle qui affirme sa royauté et sa divinité, sinon par l’Esprit-Saint. L’orgueil est donc le grand ennemi de nos âmes, car comment Dieu pourra-t-Il nous pardonner si nous ne voulons pas nous reconnaître coupables? Comment pourrait-il avoir compassion de nous et exercer à notre égard Sa miséricorde (Or.) s’il n’y a en nous aucune misère avouée à laquelle Il puisse compatir? L’humilité au contraire, qui se plaît à reconnaître notre néant et notre immense besoin de Dieu, est assurée de s’attirer Ses plus grands bienfaits (Or.). L’Église développe ces pensées tant au Bréviaire qu’à la messe. Au Bréviaire d’abord, en nous donnant à lire l’histoire de l’orgueilleuse Athalie. — Fille d’Achab et de Jézabel, et aussi impie que sa mère, Athalie épousa le roi de Juda, Joram, qui mourut peu après. La reine se trouva alors seule maîtresse du royaume de Juda, et pour le rester toujours, elle fit massacrer toute la famille de David. Mais Josabeth, épouse du grand-prêtre Joïada, enleva de son berceau le dernier-né de la famille royale et le cacha dans le Temple. Il se nommait Joas. Pendant six ans Athalie régna dans le pays et éleva des autels à Baal jusque dans le parvis du Temple. Quand Joas eut sept ans, le grand-prêtre, entouré d’hommes résolus et fortement armés, leur montra le jeune roi et leur dit: «Vous entourerez l’enfant royal et si quelqu’un franchit vos rangs, vous le mettrez à mort!» Et quand le peuple afflua dans le parvis à l’heure de la prière, Joïada fit avancer Joas, le consacra et le couronna à la vue de toute l’assemblée, qui applaudit et s’écria; «Vive le Roi!» Lorsqu’Athalie entendit ces clameurs, elle sortit de son palais et entra dans le parvis. Quand elle aperçut le jeune roi Joas assis sur l’estrade au milieu des chefs et le peuple qui l’acclamait au son des trompettes, elle déchira ses vêtements en criant: «Conspiration! Trahison!» Le grand-prêtre ordonna de la faire sortir des saints parvis et lorsqu’elle arriva au seuil de son palais on la tua. Saisissant exemple du châtiment réservé à l’orgueil et des bénédictions que Dieu répand sur les humbles. Le roi Joas s’assit sur le trône de David, son aïeul, et régna quarante ans à Jérusalem. Il travailla à réparer et à embellir le Temple. L’Écriture fait de lui ce bel éloge: «Joas fit ce qui est juste aux yeux de Dieu»; c’est l’antienne du Magnificat des vêpres. Il y a, dit Pascal, deux classes d’hommes, les saints qui s’estiment coupables de toutes les fautes et les pécheurs qui ne se croient coupables de rien. Les premiers sont humbles et Dieu les élèvera en les glorifiant, les seconds sont orgueilleux et Il les abaissera en les châtiant. «Dieu, dit S. Jean Chrysostome, punit l’orgueil; Il a submergé le monde, brûlé Sodome, englouti l’armée des Égyptiens, car c’est Lui qui a porté aux coupables tous ces coups et d’autres encore. Mais, direz-vous, Dieu est indulgent! Sans doute. Mais toutes ces choses, alors, ne sont que des mots. Et ce riche qui méprisait Lazare n’est point puni? Et les vierges folles ne sont point rejetées par l’Époux? Alors celui qui se trouve au banquet avec des vêtements souillés, n’aura pas les mains et les pieds liés et ne périra point? Celui qui exigea de son compagnon les cent deniers ne sera point livré aux bourreaux? Ou bien Dieu S’en tiendrait-Il à faire des menaces? Pour moi il me serait facile de prouver le contraire: d’après ce que Dieu a dit et d’après ce qu’Il a fait dans le passé, préjugeons de ce qu’Il fera dans l'avenir. Ayons donc le constant souvenir du redoutable tribunal, du fleuve de feu, des chaînes rivées à perpétuité, des ténèbres profondes, des grincements de dents et du ver qui empoisonne et qui ronge» (2e nocturne). Ce sera le meilleur moyen d’entretenir en nous l’humilité qui nous fait dire avec l’Église: «J’ai crié vers le Seigneur, et Il a exaucé ma voix.» (Intr.). «Gardez-moi, Seigneur, comme la pupille de l’œil; Vos yeux voient bien ce qui est droit» (Grad.). «Vers Vous, Seigneur, j’élève mon âme; en Vous, mon Dieu, je mets ma confiance. Que je ne devienne pas pour mes ennemis un objet de moquerie! Non, ceux qui espèrent en Vous ne seront pas confondus.» (Off.) Retenons la grande leçon de l'évangile du pharisien et du publicain. Ps. 54, 17-23 — J'ai crié vers le Seigneur et il a écouté ma voix; il m’a délivré de ceux qui marchaient contre moi, et il les a humiliés, lui qui est avant les siècles et demeure éternellement. Remets tes soucis au Seigneur et lui-même te nourrira. — Ps. Prêtez l’oreille, Seigneur, à ma prière, et ne Vous dérobez pas à ma supplication; écoutez-moi et exaucez-moi. Gloria Patri. Oraison. — O Dieu qui manifestez principalement Votre toute-puissance en pardonnant et en prenant pitié de nos misères, multipliez sur nous Votre miséricorde, afin que, courant vers Vos promesses, nous ayons part un jour aux biens célestes. Par Jésus-Christ, Votre Fils, N.-S.... S. Paul explique aux Corinthiens qui sortent du paganisme que tout chez les chrétiens vient de Dieu. Les dons (des langues, de prophétie, etc.) sont distribués par l’Esprit-Saint; les ministères ecclésiastiques (sacerdoce, diaconat, apostolat) viennent du Christ; les opérations surnaturelles (conversions, guérisons) sont appropriées au Père en vertu de Sa toute-puissance créatrice. Cette épître est pour nous comme pour les Corinthiens une leçon d’humilité. Lecture de l’Épître du bienheureux Apôtre Paul aux Corinthiens (I Cor. 12, 2-11) Les dons de sagesse, de science, de miracle et de prophétie viennent de l’Esprit-Saint et appartiennent en propre à l’Église catholique, qui seule possède l’Esprit de Jésus. Ce divin Esprit les distribue à ceux qu’il Lui plaît, dans le temps et selon la mesure qu’il Lui plaît, pour la gloire de Dieu et le bien des âmes. Il les a distribués dans les premiers âges du christianisme avec plus d’abondance et d’éclat, parce que alors ils étaient indispensables à l’établissement de la foi et à la conversion des païens. Étant devenus plus tard moins nécessaires, ils ont été aussi moins fréquents ou moins remarqués. Cependant, dans tous les siècles, et de nos jours même, ils n’ont point été retirés à l’Église. L’Esprit de Dieu, qui vit perpétuellement en elle, tient en dépôt dans son sein toute la richesse de ses dons, et de temps à autre il suscite des âmes privilégiées pour les manifester au monde. Pour nous, ne demandons à Dieu d’autres dons que ceux de la foi et la charité: ceux-là suffisent pour notre propre salut. Mais il faut que l’Esprit-Saint vienne Lui-même les répandre en nous. Telle est notre faiblesse, que, sans un mouvement de Sa grâce, nous ne pouvons pas même prononcer le nom du Seigneur Jésus d’une manière utile à nos âmes et méritoire pour le Ciel. (Abbé Janvier) Gardez-moi, Seigneur, comme la pupille de l’œil, abritez-moi à l’ombre de Vos ailes. ℣. Que devant Vous ma cause prévale: que Vos yeux voient mon bon droit. Alléluia, alléluia. ℣. À Vous convient la louange, Seigneur, dans Sion; qu’envers Vous l’on acquitte des vœux en Jérusalem. Alléluia. «Moi, dit le pharisien, je suis juste, et tous les autres hommes sont pécheurs. Orgueilleux, commente S. Augustin, voici pour toi, dans le voisinage d’un publicain, l’occasion de t’enfler davantage. Cherchez dans les paroles de cet homme ce qu’il demande à Dieu et vous ne trouverez rien; monté au Temple pour prier, il ne veut rien demander à Dieu, il ne fait que se louer; non seulement il n’adresse point de prière à Dieu, mais il se comble d’éloges; bien plus il va jusqu’à insulter celui qui prie. Le publicain au contraire se tenait éloigné et cependant il était près de Dieu; la connaissance de son propre cœur le tenait à distance, mais un sentiment de foi le rapprochait. Pour attirer les regards du Seigneur, il n’osait lever les yeux vers Lui; sa conscience l’accablait, mais l’espérance le relevait.» (Matines). Suite du saint Évangile selon saint Luc (18, 9-14). Remarquons, ici, dans la personne de ce publicain, les qualités de la bonne prière, et tâchons de les reproduire quand nous prions. Sources: Missel quotidien et vespéral, par Dom Gaspar Lefebvre et les Bénédictins de l'Abbaye de St-André, Apostolat Liturgique, Bruges, 1951Dixième Dimanche après la Pentecôte - Le Pharisien et le Publicain
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Épître
Mes frères, vous savez qu'étant païens, vous alliez aux idoles muettes, comme on vous y menait. Apprenez donc que nul, s’il parle sous l’action de Dieu, ne dit: «Jésus soit anathème!» Comme personne ne peut dire: «Jésus est le Seigneur», si ce n’est par l’Esprit-Saint. Il y a diversité de dons, mais c’est le même Esprit; diversité de ministères, mais c’est le même Seigneur; diversité d’opérations mais c’est le même Dieu qui opère tout en tous. À chacun la manifestation de l’Esprit est donnée pour l’utilité de l’Église. À l’un est donné par l’Esprit un discours de sagesse; à un autre un discours de science selon le même Esprit; à un autre la foi dans le même Esprit; à un autre le don des guérisons, dans ce seul et même Esprit; à un autre le don d’opérer des miracles, à un autre le don de prophétie, à un autre le discernement des esprits, à un autre le don de parler diverses langues, à un autre celui de les interpréter. Tout cela est l’œuvre d’un seul et même Esprit, qui distribue Ses dons à chacun comme il Lui plaît.Réflexion sur l'Épître
Graduel
Évangile
En ce temps-là, Jésus dit cette parabole à l’adresse de certains qui se croyaient eux-mêmes justes, et qui méprisaient les autres: «Deux hommes montèrent au Temple pour prier; l’un était pharisien, l’autre publicain. Le pharisien, debout, priait ainsi en lui-même: Mon Dieu, je Vous rends grâces de ce que je ne suis pas comme le reste des hommes, voleurs, malhonnêtes, adultères, ou bien encore comme ce publicain. Je jeûne deux fois la semaine, je paie la dîme de mes biens. Et le publicain, se tenant à distance, n’osait même pas lever les yeux vers le ciel, mais il se frappait la poitrine en disant: Mon Dieu, ayez pitié de moi qui suis un pécheur. Je vous le dis, celui-ci descendit chez lui justifié, plutôt que l’autre; car quiconque s’élève sera abaissé et quiconque s’abaisse sera élevé.» — Credo.Réflexion sur l'Évangile
1° Il se tenait éloigné. En entrant dans nos églises, pensons à la sainteté du lieu; purifions-nous en portant l’eau sainte à nos fronts, et pénétrons-nous du plus profond respect, pour la grandeur de Celui que nous venons adorer. Avançons ensuite avec modestie; prenons une place convenable; et si elle n’est pas telle que le souhaiterait notre vanité, pensons humblement, que nous sommes trop honorés de l’avoir, puisque nos péchés mériteraient l’exclusion du temple.
2° Il n’osait pas même lever les yeux. Il est permis sans doute de lever les yeux vers l’autel, pour réclamer, avec plus d’instance, le secours d’en haut; mais, le plus souvent, tenons-les abaissés vers la terre, avec humilité et respect. Évitons, par-dessus tout, de les porter çà et là, sur tous les objets qui se présentent ou qui nous environnent, pour ne pas donner un aliment dangereux, à notre dissipation naturelle et à la curiosité de notre esprit.
3° Il se frappait la poitrine. C’est ce que le prêtre fait au commencement de la messe et avant la communion: imitons-le à ces deux moments et chaque fois que les rites du sacrifice l’exigent. Pendant le reste du temps, lisons dans un livre ou méditons en silence les prières de la sainte messe, évitant toute posture qui serait un indice de nonchalance, de légèreté ou d’ennui.
4° Il disait: Mon Dieu, ayez pitié de moi, qui suis un pécheur. Quand nous sommes en face de Dieu, pensons, avant toutes choses, à nos péchés, et que notre cœur soit brisé de douleur. Répétons avec humilité et confiance: Ayez pitié de moi. Fussions-nous chargés d’iniquités énormes, Dieu écoutera notre prière; tôt ou tard, Il nous fera la grâce d’être justifiés. (Abbé Janvier)
Épîtres et Évangiles des dimanches et des principales Fêtes de l’année, avec des Réflexions, par M. l’abbé Pierre-Désiré Janvier, Doyen du Chapitre de l’Église métropolitaine de Tours, Maison Mame, 1938