Onzième Dimanche après la Pentecôte - La guérison du sourd-muet

Parabole du Pharisien et du Publicain
« Ephphétha », c’est-à-dire: « Ouvre-toi ».

Considérations

« Ephphétha », c’est-à-dire: « Ouvre-toi » (Évangile)

Mis en parallèle, le Bréviaire et le Missel nous montrent aujourd’hui comment Ézéchias, échappant à la mort et délivrant son peuple de ses ennemis, est une figure du Christ ressuscité des morts et donnant à son peuple de ressusciter avec lui à une vie nouvelle.

L’Église fait lire cette semaine au Bréviaire l’histoire d’Ézéchias, le 13e roi d’Israël. — Le royaume de Juda, amputé des douze tribus du Nord presque au lendemain de la mort de Salomon, dura environ 350 ans et compta 20 rois. Plusieurs de ces rois furent impies et mauvais; d’autres, comme Salomon lui-même, finirent dans le péché; mais quatre d’entre eux furent toute leur vie de grands serviteurs de Dieu: ce sont Josaphat, Joathan, Ézéchias et Josias. D’Ézéchias, qui nous occupe aujourd’hui, l’Écriture fait ce bel éloge: « Le roi Ézéchias mit sa confiance en Jéhovah, Dieu d’Israël, et il n’eut pas son semblable parmi tous les rois de Juda qui le précédèrent ou le suivirent. Aussi Dieu fut-il toujours avec lui ». Lorsque Sennachérib, roi d’Assyrie, voulut s’emparer de Jérusalem, Ézéchias monta au Temple et y adressa à Dieu une prière aussi pure que celles de David et de Salomon. Dieu lui envoya alors le prophète Isaïe pour lui dire de ne rien craindre, car Il protégerait son royaume. L’ange de Jéhovah frappa cent quatre-vingt-cinq mille hommes de la peste dans le camp des Assyriens, et Sennachérib épouvanté retourna à marches forcées à Ninive. Un peu plus tard, le roi tomba malade et Isaïe lui annonça qu’il allait mourir. Craignant que Sennachérib n’en profitât pour revenir à l’assaut de Jérusalem, Ézéchias supplia Dieu de lui venir en aide et de prolonger ses jours; et de nouveau Dieu l’exauça: « J’ai entendu ta prière et J’ai vu tes larmes; voici que Je te guéris, et dans trois jours tu monteras au Temple ». Et le roi guérit et le peuple fut délivré des attaques de l’ennemi.

Ézéchias couché sur son lit de mort et se levant sain et sauf après trois jours préfigure la mort de Jésus sur la croix et sa résurrection le troisième jour. Échappant à la mort et rendu à la vie, le roi de Juda arracha son peuple au pouvoir de ses ennemis, tout comme le Christ, vrai roi de Juda, est sorti triomphant de la mort et en ressuscitant nous a rendu la vie.

— La messe d’aujourd’hui est remplie de ces pensées. Le verset de l'introït annonce la victoire du peuple de Dieu et la fuite de ses ennemis. Dans l’épître, S. Paul insiste sur la résurrection du Christ, fondement et gage assuré de notre salut. L’évangile enfin de la guérison du sourd-muet, avec l’Ephphetha « ouvre-toi » que l'Église a repris parmi les rites du baptême, nous rappelle que passé de la mort à la vie on est « ouvert » désormais aux choses de la foi. Il se peut même que l’emploi comme offertoire d’un verset du psaume 29, traditionnellement appliqué par l’Église à la résurrection et à l’ascension, ait été inspiré par le même ordre de pensées.

Ainsi comprise, la messe d’aujourd’hui se présente donc comme une sorte de tryptique; sur le panneau central, on voit Jésus enseveli et ressuscité; sur le volet de gauche Ézéchias. figure du Christ, étendu sur sa couche et guéri par Dieu; sur le volet de droite, l’extension de la victoire du Christ au peuple de Dieu par le baptême.

Puissions-nous toujours mourir davantage à nos péchés et vivre avec le Christ d’une vie toute nouvelle. C’est le programme qui nous est proposé par la messe d’aujourd'hui.

Liturgie de la Messe

Introït

Ps. 67, 6-7 et 36 — Dieu qui trône en Son sanctuaire; Dieu, qui fait l’unité des Siens et les rassemble en Sa maison; Lui-même donnera force et puissance à Son peuple. — Ps. Que Dieu se lève et que Ses ennemis soient dissipés; que ceux qui Le haïssent fuient devant Sa face. Gloria Patri.

Collecte

Oraison. — Dieu tout-puissant et éternel, dont l’immense bonté va au-delà de nos mérites et même de nos désirs, répandez sur nous Votre miséricorde, remettant ce que notre conscience a sujet de craindre et accordant ce que notre prière n’ose point espérer. Par Jésus-Christ, Votre Fils, N.-S....

L’Apôtre S. Paul prouve aux Corinthiens la résurrection de Jésus. Il cite les noms de tous les témoins de cet événement sans lequel le christianisme n’aurait aucune raison d’être, car si Jésus n’est pas ressuscité, nous non plus nous ne ressusciterons pas et vaine est notre espérance.

Épître

Lecture de l’Épître du bienheureux Apôtre Paul aux Corinthiens (I Cor. 15, 1-10)
Je vous rappelle, frères, l’Évangile que je vous ai prêché, que vous avez reçu, dans lequel vous persévérez, par lequel vous êtes sauvés, si vous le gardez tel que je vous l’ai annoncé: à moins que vous n’ayez cru en vain. Je vous ai transmis en effet, tout d’abord, ce que j’ai moi-même reçu, à savoir que le Christ est mort pour nos péchés, selon les Écritures; qu’Il a été enseveli et qu’il est ressuscité le troisième jour, selon les Écritures; qu’Il est apparu à Céphas puis aux Onze; Il est apparu ensuite à plus de cinq cents frères à la fois, dont la plupart vivent encore à présent et dont quelques-uns sont morts; Il est apparu ensuite à Jacques, puis à tous les Apôtres, et en tout dernier lieu, Il m’est apparu à moi, comme à l’avorton. Car je suis le moindre des Apôtres, moi qui ne suis pas digne du nom d’apôtre parce que j’ai persécuté l’Église de Dieu. C’est par la grâce de Dieu que je suis ce que je suis, et Sa grâce en moi n’a pas été stérile.

Réflexion sur l'Épître

Avec quel accent de conviction l’Apôtre ne prêche-t-il pas ici la résurrection en Jésus-Christ! Il est ressuscité, dit-il, je L’ai vu, Il S’est montré à moi, après S’être manifesté aux Apôtres et à plus de cinq cents frères réunis. Remarquez que ces nombreux témoins étaient des hommes simples, timides, incapables de tromper, et pour la plupart longtemps incrédules eux-mêmes, ayant eu besoin, pour être convaincus, de voir plusieurs fois, de regarder de leurs yeux et de toucher de leurs mains, de boire et de manger pendant quarante jours avec le Sauveur après Sa résurrection. Ils ne se contentent pas de croire seuls: la force de la vérité leur fait entreprendre le dessein le plus hardi et en apparence le plus insensé, celui de publier hautement un fait si incroyable et de le faire croire au monde entier. Et pourtant le monde entier l’a cru! En vain les Apôtres ont-ils été persécutés, bannis, fouettés, lapidés, mis à mort, torturés en mille manières: tous ont scellé de leur sang la vérité qu’ils prêchaient, sans qu’un seul ne se soit jamais démenti. Ajoutez à cette inébranlable constance une pureté irréprochable dans leurs mœurs, une douceur, une humilité, une patience à toute épreuve; ajoutez les miracles et les prodiges inouïs qu’ils faisaient éclater partout aux yeux des peuples. Que de preuves réunies et convaincantes! Ne serait-ce pas un prodige plus grand encore, si un homme raisonnable refusait de croire une vérité si solidement appuyée et si universellement crue? – Ô mon Dieu! pour croire ainsi j’ai besoin, comme le grand Apôtre, du secours de Votre grâce; ne me la refusez pas. Qu’elle vienne convaincre mon esprit, exciter ma volonté, toucher mon cœur! Je ne puis rien sans elle; mais avec elle je puis persévérer jusqu’à la mort, et m’enrichir au centuple pour l’éternité! (Abbé Janvier)

Graduel

Mon cœur a espéré en Dieu et j’ai été secouru; ma chair a refleuri et mon cœur déborde de louange envers Lui. ℣. C’est vers Vous, Seigneur, que je crie: mon Dieu, ne gardez pas le silence ne Vous éloignez pas de moi.
Alléluia, alléluia. ℣. Avec allégresse chantez Dieu qui nous vient en aide, acclamez le Dieu de Jacob; entonnez sur la cithare un cantique de joie. Alléluia.

La guérison du sourd-muet

La guérison du sourd-muet racontée dans cet évangile est l’histoire des miséricordes divines à l’égard de chacun de nous. Mais ces miséricordes se résument toutes dans le baptême qui nous a donné accès aux choses de Dieu (Ephphetha : ouvre-toi), et qui, comme une eau vive, jaillit en nous jusqu’à la vie éternelle.

Évangile

Suite du saint Évangile selon saint Marc (7, 31-37).
En ce temps-là, Jésus, quittant le pays de Tyr, passa par Sidon et revint près de la mer de Galilée, en traversant le territoire de la Décapole. On Lui amena un sourd-muet et on Le pria de lui imposer les mains. Le prenant à l’écart de la foule, Il lui mit les doigts dans les oreilles, et prenant de la salive Il lui toucha la langue. Puis, levant les yeux au ciel, Il soupira et dit: « Ephphétha », c’est-à-dire « Ouvre-toi ». Et aussitôt ses oreilles s’ouvrirent et sa langue se délia; et il parlait correctement. Jésus leur ordonna de ne le dire à personne; mais plus Il le leur ordonnait, plus ils le proclamaient, et ils étaient saisis d’admiration, disant: «Il opère toutes sortes de bienfaits, Il fait entendre les sourds et parler les muets». — Credo.

Réflexion sur l'Évangile

Divin Jésus, c’est l’endurcissement de nos cœurs qui Vous fait lever les yeux au ciel et Vous arrache ce soupir. Hélas! nous avons des oreilles, et nous n’entendons pas la voix de Vos inspirations. Nous avons une langue, et nous ne l’employons pas à Vous glorifier, et à Vous bénir de Vos bienfaits. Voilà l’effet du péché; il est en nous comme un poids qui nous appesantit, comme un lien qui nous enchaîne; il nous rend à la fois sourds et muets dans l’ordre spirituel. Guérissez-moi, Seigneur! Conduisez-moi à l’écart avec Vous dans le recueillement de la prière, dans le silence de l’église, dans le secret du tribunal de la pénitence. J’irai partout où Vous voudrez. Daignez, je Vous en conjure, m’appliquer les mérites de Vos sueurs et de Votre sang; faites reposer en moi Votre Esprit, qui est appelé le doigt de Dieu; que Votre voix retentisse fortement aux oreilles de mon cœur, et elles seront ouvertes, mes liens seront brisés, mon âme se dilatera dans la charité, et je chanterai à jamais Vos miséricordes. (Abbé Janvier)

Sources: Missel quotidien et vespéral, par Dom Gaspar Lefebvre et les Bénédictins de l'Abbaye de St-André, Apostolat Liturgique, Bruges, 1951
Épîtres et Évangiles des dimanches et des principales Fêtes de l’année, avec des Réflexions, par M. l’abbé Pierre-Désiré Janvier, Doyen du Chapitre de l’Église métropolitaine de Tours, Maison Mame, 1938