Treizième Dimanche après la Pentecôte - Guérison des dix lépreux

Guérison des dix lépreux
Jésus dit au Samaritain: «Lève-toi, ta foi t'a sauvé.» (Évangile)

Considérations

Guérison des dix lépreux (Évangile)

Continuant la lecture des livres de la Sagesse commencée dimanche passé, l’Église nous fait lire aujourd’hui au Bréviaire le commencement du Livre de l’Ecclésiaste: » Vanité des vanités, déclare l’auteur sacré. Tout est vanité. Quel profit pour l’homme dans toute la peine qu’il se donne sous le soleil? » (1er nocturne). Lorsque Salomon était captivé par l’amour des choses du monde, dit S. Jean Chrysostome, il les croyait grandes et admirables; il y consacrait beaucoup de peine et de soin, édifiant des palais magnifiques, amassant beaucoup d’or, poursuivant tout ce qui peut donner plaisir et satisfaction. Mais dès que, rentré en lui-même, il put, comme d’un abîme ténébreux, regarder vers la lumière de la vraie sagesse, alors il poussa cette exclamation sublime et digne du ciel « Vanité des vanités, et tout est vanité ». Et pourtant un si grand amour de la sagesse n’était pas exigé de Salomon qui vivait sous l’ancienne Loi; mais nous... Que nous demande-t-on ? rien de moins que de mener une vie pareille à celle des Vertus célestes, qui sont tout intelligence et incorporelles » (2e nocturne). Et en effet, notre vie, tout entière orientée vers l’au-delà doit sans cesse s’animer de foi, d’espérance et de charité, pour ne s’attacher qu’aux promesses divines et aimer ce que Dieu nous a commandé (Or.).

Toute la messe d’aujourd’hui a précisément pour but d’augmenter notre foi en Jésus qui seul peut nous tirer de notre misère et nous sauver. — Déjà sous l’Ancien Testament, dit S. Paul, c’est la foi au Christ qui sauvait. Il y avait bien la Loi, mais une loi impuissante à sauver par elle-même, et dès avant la Loi, Abraham fut sauvé par sa foi (Ép.). L'évangile donne le même enseignement. Dix lépreux font appel au Christ, qui les guérit tous de la lèpre, mais un seul revient après sa guérison, animé d’une foi qui lui vaut d’être guéri aussi de la lèpre du péché. « Les neuf autres, dit S. Augustin, auraient cru s’abaisser en remerciant; et en, ne remerciant pas, ils sont réprouvés et rejetés..., tandis que l’unique qui rend grâce est approuvé et recueilli par l'unique Église. C’est ainsi que les Juifs perdirent par leur orgueil le royaume des cieux où règne la plus grande unité » (Matines). L'introït, le Graduel, l'Alléluia, l'offertoire, sont autant d’appels confiants, basés sur notre foi au Christ, et exprimés dans les termes mêmes où l’ancien Israël se réclamait de l’alliance et des promesses pour s’en remettre à Dieu des secours de salut dont il avait besoin. Notre foi fait de nous les vrais fils d’Abraham et les héritiers de la promesse que Dieu lui avait faite de le bénir dans sa postérité; l’Église ne manque pas de nous le rappeler; elle le fait aujourd'hui comme elle l’a déjà fait le Samedi Saint et comme presque chaque fois qu’elle évoque la foi des baptisés: « Ô Dieu, Père Souverain des croyants, qui multipliez sur toute la terre les enfants de la promesse, et donnez à Abraham de devenir le père de toutes les nations, accordez à vos peuples d’entrer dignement dans la vie chrétienne à laquelle vous les conviez » (Oraison après la 3e prophétie du Samedi Saint).

Liturgie de la Messe

Introït

Ps. 73, 20, 19 et 23 — Souvenez-vous de votre alliance, Seigneur, et n’abandonnez pas sans fin les âmes des vôtres dans leur misère. Levez-vous, Seigneur, défendez votre cause: n’oubliez pas les appels de ceux qui vous cherchent. — Ps. Pourquoi, Seigneur, nous avez-vous rejetés pour toujours? pourquoi votre colère s’est-elle allumée contre le troupeau de votre garde? Gloria Patri.

Collecte

Oraison. — Dieu tout-puissant et éternel, donnez-nous un accroissement de foi, d’espérance et de charité; et pour que nous méritions d’atteindre ce que vous promettez, faites-nous aimer ce que vous commandez. Par Jésus-Christ, Votre Fils, N.-S...

Les Juifs voulaient imposer la loi mosaïque aux chrétiens comme si en dehors d’elle on ne pouvait se sauver. S. Paul montre que c’est la foi en Jésus-Christ qui donne la vie éternelle et non pas la loi du Sinaï, et pour le prouver il rappelle que l’alliance et les promesses concernaient Abraham et sa postérité, c’est-à-dire le Christ, et dans le Christ tous ceux qui croiraient en lui: là est le testament de Dieu que rien n’a pu annuler ni changer, pas même la Loi, venue après Abraham. Mais alors, pourquoi Dieu a-t-il établi la Loi? Il l’a fait, dit S. Paul, pour que l’homme, en face de toutes les prescriptions que cette loi impose sans donner la force de les accomplir, sente sa faiblesse et aspire avec plus d’ardeur à la loi d’amour qui régit ceux qui ont foi en Jésus et qui seule peut sauver. Pour avoir part à l’héritage céleste promis à Abraham, il faut donc adhérer au Christ par la foi, ce qui nous fait appartenir du même coup à la lignée spirituelle du Père des croyants.

Épître

Lecture de l’Épître du bienheureux Apôtre Paul aux Galates (3, 16-22)
Mes frères, c’est à Abraham qu’ont été adressées les promesses et à sa descendance. On ne dit pas ses descendants, comme s’ils étaient plusieurs, mais, comme s’il s’agissait d’un seul: « Et à ta descendance », qui est le Christ. Or, je dis ceci: la disposition sanctionnée par Dieu, la Loi venue quatre cents ans plus tard ne l’abroge pas en rendant vaine la promesse. Car si c’est la Loi qui assure l’héritage, ce n’est plus la promesse; or, à Abraham, c’est par une promesse que Dieu a donné sa faveur. Qu’est donc la Loi? Elle a été ajoutée à cause des transgressions, jusqu’à ce que vienne la descendance à qui la promesse a été faite. Elle a été promulguée par des Anges, par l’entremise d’un médiateur. Or le médiateur n’est pas pour un seul, tandis que Dieu est seul. La
Loi est-elle donc contraire aux promesses de Dieu? Pas du tout. S’il avait été donné une loi qui pût procurer la vie, la justice viendrait réellement de la Loi; mais l’Écriture a tout enfermé sous le péché, pour que la promesse fût donnée aux croyants en vertu de la foi en Jésus-Christ.

Réflexion sur l'Épître

Dieu Se conduit à notre égard avec la tendresse et la générosité d’un père. Pour nous réjouir, nous animer dans la voie du devoir par la vue des récompenses, Il Se lie et S’engage envers nous par de magnifiques promesses. Il nous promet tout ce qui peut assurer notre vrai bonheur, le pardon de nos fautes, les grâces de Son amitié, Sa protection contre tous nos ennemis, l’héritage d’un royaume de gloire et de félicités éternelles. Ces grandes promesses sont presque aussi anciennes que le monde. Dieu les a faites d’abord à Abraham et aux patriarches, puis de siècle en siècle aux justes de la loi de Moïse; Il les a renouvelées ensuite dans la personne de Jésus-Christ, Son Fils; Il les renouvelle encore tous les jours par la voix de Son Église, en qui habitent Sa parole et Son Esprit. Elles sont immuables et infaillibles comme Dieu même, parce qu’elles reposent sur Sa parole souveraine et Sa toute-puissance infinie: aucune loi divine ou humaine ne saurait prescrire contre elles et les annuler. Seulement Dieu exige, de notre côté, une condition rigoureuse, la foi en Jésus-Christ: non pas une foi morte et stérile, impuissante pour le salut, mais la foi véritable qui opère par la charité et qui produit les bonnes œuvres. Chrétiens! admirez la richesse et la solidité de vos espérances. Par la foi, vous êtes les héritiers de toutes les bénédictions promises à Abraham, le père de l’ancien peuple, et à Jésus-Christ, le Chef du peuple nouveau. Que vous faut-il de plus pour cette vie et pour l’autre? La fragile promesse d’un homme mortel vous séduit, vous transporte, vous fait braver mille périls, entreprendre des travaux souvent au-dessus de vos forces. Serez-vous insensibles à l’espérance des biens célestes? La parole d’un Dieu ne fera-t-elle rien sur vous? – Dieu tout-puissant et éternel, augmentez en nous la foi, l’espérance et la charité, et, pour que nous puissions obtenir ce que Vous promettez, faites que nous aimions ce que Vous commandez. (Abbé Janvier)

Graduel

Souvenez-vous de votre alliance, Seigneur, et n’abandonnez pas sans fin les âmes des vôtres dans leur misère. ℣. Levez-vous, Seigneur, défendez votre cause: souvenez-vous de l’insulte faite à vos serviteurs.

Alléluia, alléluia. ℣. Seigneur, Vous avez été un asile pour nous d’âge en âge. Alléluia.

Les lépreux ne pouvaient s’approcher de personne. Tous ensemble ils crient de loin à Jésus, qu’ils appellent Sauveur pour faire appel à sa miséricorde et Maître pour rendre hommage à son autorité. Le Christ les envoya aux prêtres afin que ces derniers puissent constater officiellement la guérison qu’il allait faire et reconnaître à ce pouvoir miraculeux le Messie. Les lépreux, pleins de confiance en la parole de Jésus, prirent le chemin de Jérusalem comme s’ils étaient guéris et leur lèpre disparut. Seul le Samaritain, qui appartenait à une race abhorrée des Juifs et étrangère aux divines promesses, retourna sur ses pas pour remercier Jésus et reconnaître par là que c’était à Lui qu’il devait sa guérison. Le Sauveur constata avec tristesse que seul • cet étranger » avait de la sorte rendu gloire à Dieu, et que les autres ne s’étaient pas souciés de Celui qui les avait guéris. Il est vraisemblable, comme l’ont pensé les interprètes, que Jésus délivra aussi cet homme de la lèpre de son âme qui est le péché.

Va, ta foi t'a sauvé.

Évangile

Suite du saint Évangile selon saint Luc (17, 11-19).
En ce temps-là, Jésus, se rendant à Jérusalem traversait la Samarie et la Galilée. Comme il entrait dans un village, dix lépreux vinrent au-devant de lui; ils s’arrêtèrent à distance et élèvèrent la voix en disant: Jésus, Maître, aie pitié de nous ». Dès qu’il les vit, il leur dit: « Allez, montrez-vous aux prêtres ». Et comme ils y allaient, ils furent guéris. L’un d’eux, voyant qu’il était guéri, revint sur ses pas, glorifiant Dieu à haute voix. Il se jeta le visage contre terre aux pieds de Jésus en lui rendant grâces. Or c’était un Samaritain. Alors Jésus, prenant la parole, dit: « Est-ce que les dix n’ont pas été guéris? Et les neuf autres, où sont-ils? Il ne s’en est pas trouvé pour revenir rendre gloire à Dieu, à l’exception de cet étranger ! » Et il lui dit: « Lève-toi, va; ta foi t’a sauvé». — Credo.

Réflexion sur l'Évangile

Jésus-Christ n’aurait-Il pas le droit de Se plaindre aussi de notre ingratitude? À chaque moment, Il nous comble de Ses dons: vie, santé, facultés de l’âme et du corps, succès dans nos affaires, biens de la nature, lumière de la foi, richesses de la grâce, nous Lui devons tout, et nous ne pensons presque jamais à L’en remercier. Souvent, hélas! nous tournons contre Lui Ses propres bienfaits, en les employant pour L’offenser. Être ingrat envers les hommes, c’est la plus noire de toutes les lâchetés; qu’est-ce donc que de l’être envers Dieu? L’ingratitude arrête envers nous le cours de Ses faveurs; c’est un vent brûlant qui dessèche la source de Sa miséricorde, et n’excite plus que le feu de Sa colère. La reconnaissance, au contraire, est le propre des vrais enfants de Dieu; elle nous rend dignes de Ses dons; elle l’oblige à nous en faire davantage. C’est la plus efficace des prières. C’est la seule récompense que Dieu demande de nous. Grâces vous soient rendues, ô Seigneur, pour tous Vos bienfaits! J’étais dans le néant, et Vous m’avez donné l’existence; j’étais né esclave du démon, et Vous m’avez fait enfant de l’Église. J’étais couvert de la lèpre du péché, et Vous m’avez orné des plus riches dons de la grâce. Soyez à jamais béni, ô mon Dieu! et que tout en moi, glorifie Votre saint nom! (Abbé Janvier)

Sources: Missel quotidien et vespéral, par Dom Gaspar Lefebvre et les Bénédictins de l'Abbaye de St-André, Apostolat Liturgique, Bruges, 1951
Épîtres et Évangiles des dimanches et des principales Fêtes de l’année, avec des Réflexions, par M. l’abbé Pierre-Désiré Janvier, Doyen du Chapitre de l’Église métropolitaine de Tours, Maison Mame, 1938